<108>Entre nous aucun partage,
Même goût et même usage,
Notre tendre amitié nous rendait tout commun;
Jamais froideur ni nuage
Ne put exciter l'orage
D'un démêlé importun.
Les Jeux et les Plaisirs t'accompagnaient sans cesse,
Et ton esprit, nourri des plus galants écrits,
Avait l'art d'ennoblir par sa délicatesse
Les bruyants transports des Ris.
Digne par ta politesse
D'être mis au niveau des célèbres esprits
Dont s'applaudissait la Grèce,
Ou dont se vante Paris;
Plus digne par ton cœur d'occuper une place
Chez le peu de héros connus par l'amitié!
Si je pouvais jouer de la lyre d'Horace,
Je ferais retentir les échos du Parnasse
Des regrets de ce cœur toujours au tien lié.
Je dirais que tu surpasse
Achate et Pirithoüs,
Pylade, Oreste et Nisus.
J'immortaliserais, dans l'ardeur qui m'enflamme,
Les éclatantes vertus
Qui brillaient dans ta belle âme.
Mais, Dieu! je vois le jour, et tu ne le vois plus!
Il n'est donc que trop vrai, la mort inexorable
Ravit également le vulgaire hébété
Et l'homme le plus aimable.
Elle n'épargne rien, vertu ni dignité;
Sur les rives du Cocyte