<147>De ce nom respecté décorant sa vengeance,
Et ne distinguant point dans son aveuglement
L'ennemi de l'ami, l'étranger du parent,
Elle court s'égorger sans avoir l'âme noire,
Et pense par le crime arriver à la gloire.
Les premiers mouvements doivent se pardonner,
L'impétueux courroux ne peut se gouverner;
Mais lorsque de sang-froid, sans haine, sans colère,
Un préjugé cruel que le monde révère
Pour sauver leur honneur oblige deux amis
De combattre en champ clos comme des ennemis,
Qui ne déplorerait qu'un caprice bizarre
Impose à l'honneur même une loi si barbare?
Sont-ce des insensés, sont-ce des furieux
Que ces vengeurs cruels d'un honneur odieux?
Non, c'est un peuple doux, généreux, magnanime.
Qu'un préjugé funeste entraîne dans le crime,
Qui, du ciel partagé d'une rare valeur,
En pervertit l'usage, et la change en fureur.
Arrêtez, malheureux! ayez l'âme attendrie;
Votre sang est trop pur, trop cher à la patrie,
N'en couvrez point la terre où vous vîtes le jour.
Ah! qu'avide de sang l'implacable vautour
Tombe sur la colombe ou sur la tourterelle,
Et, déchirant leur sein de sa serre cruelle,
Disperse dans les bois leurs membres palpitants,
Tous les vautours sont nés pour être des tyrans.
Mais vous, ô Prussiens! vous êtes tous des frères,
Respectez vos foyers, vos pénates, vos pères,
Ces intérêts sacrés qui sont communs à tous;