<3>MIROIR DES PRINCES, OU INSTRUCTION DU ROI POUR LE JEUNE DUC CHARLES-EUGÈNE DE WÜRTEMBERG.

A SON ALTESSE SÉRÉNISSIME LE DUC CHARLES-EUGÈNE DE WÜRTEMBERG.

Le 6 février 1744.

Monsieur mon cousin, recevez ces avis que je vous donne comme une véritable marque de ma tendresse, et soyez persuadé que je ne vous en aurais jamais donné de semblables, sans la haute idée que vos vertus et vos talents m'ont donnée de votre personne. Regardez-moi comme votre véritable ami, en qui vous pouvez prendre confiance, et qui vous estime assez pour ne vous jamais déguiser la vérité. Je n'ai qu'un intérêt qui m'attache à vous, c'est celui de l'honneur; je crois le mien engagé à vous voir chéri de vos peuples et admiré de toute l'Europe, à vous voir heureux de cette sorte de bonheur que l'on se procure à soi-même, et d'entendre qu'une voix unanime justifie le jugement que j'ai fait du prince de Würtemberg, qu'en lui la vertu précédait le nombre des années.a J'attends avec impatience le moment de


a

Je suis jeune, il est vrai; mais aux âmes bien nées
La valeur n'attend pas le nombre des années.

Corneille, le

Cid

, acte II, scène II.