<168>peuvent réparer par leur capacité ce que l'ineptie du souverain gâterait sans doute. Le bien qui suit évidemment de cet arrangement consiste en ce que les princes nés sur le trône ont moins de morgue et de vanité que de nouveaux parvenus qui, enflés de leur grandeur et dédaignant ceux qui furent leurs égaux, se complaisent à leur faire sentir en toute occasion leur supériorité. Mais observez surtout qu'un prince qui est sûr que ses enfants lui succéderont, croyant travailler pour sa famille, s'appliquera avec bien plus de zèle au vrai bien de l'État qu'il envisage comme son patrimoine; au lieu que, dans les États électifs, les souverains ne pensent qu'à eux, à ce qui peut durer pendant leur vie, et à rien de plus; ils tâchent d'enrichir leur famille, et laissent tout dépérir dans un État qui, à leurs yeux, est une possession précaire, à laquelle il faudra renoncer un jour. Si quelqu'un veut s'en convaincre, il n'a qu'à s'informer de ce qui se passe dans les évêchés de l'Allemagne, en Pologne, à Rome même, où les tristes effets de l'élection ne sont que trop évidents. Quelque parti qu'on prenne dans ce monde, il se trouve sujet à des difficultés et souvent à de terribles inconvénients. Il faut donc, lorsqu'on se croit assez lumineux pour pouvoir éclairer le public, se garder surtout de proposer des remèdes pires que les maux dont on se plaint, et, quand on ne peut faire mieux, s'en tenir aux anciens usages, et surtout aux lois établies.