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L'ANTIMACHIAVEL, OU EXAMEN DU PRINCE DE MACHIAVEL.

AVANT-PROPOS.

Le Prince de Machiavel est en fait de morale ce qu'est l'ouvrage de Spinoza en matière de foi : Spinoza sapait les fondements de la foi, et ne tendait pas moins qu'à renverser l'édifice de la religion; Machiavel corrompit la politique, et entreprit de détruire les préceptes de la saine morale. Les erreurs de l'un n'étaient que des erreurs de spéculation; celles de l'autre regardaient la pratique. Cependant il s'est trouvé que les théologiens ont sonné le tocsin et crié aux armes contre Spinoza, qu'on a réfuté son ouvrage en forme, et qu'on a constaté la Divinité contre ses attaques, tandis que Machiavel n'a été que harcelé par quelques moralistes, et qu'il s'est soutenu, malgré eux et malgré sa pernicieuse morale, sur la chaire de la politique jusqu'à nos jours.

J'ose prendre la défense de l'humanité contre ce monstre, qui veut la détruire; j'ose opposer la raison et la justice au sophisme et au crime; et j'ai hasardé mes