<33>son père, sans citer le Tasse, qui fut dans le même cas, et sans faire mention du Corrége, qui se trouva peintre en voyant les tableaux de Raphaël, nous trouvons dans M. de Knobelsdorff un pareil exemple. Il était né peintre et grand architecte; la nature en avait fait les frais : il ne restait qu'à l'art d'y mettre la dernière main.

Pendant que M. de Knobelsdorff était au service, il employait son loisir à dessiner d'après la bosse. Il peignait déjà des paysages dans le goût de Claude-Lorrain, sans connaître un maître avec lequel il avait une si grande ressemblance. Dès qu'il eut quitté le service, il se livra à ses goûts sans retenue; il lia amitié avec le célèbre Pesne, et il n'eut point honte de lui confier l'éducation de ses talents. Sous cet habile maître, il étudia surtout ce coloris séduisant qui, par une douce illusion, empiète sur les droits de la nature, en animant la toile muette. Il ne négligea aucun genre, depuis l'histoire jusqu'aux fleurs, depuis l'huile jusqu'au pastel. La peinture le conduisit par la main à l'architecture; et ne considérant cette connaissance, dans le commencement, que pour l'emploi qu'il en pouvait faire dans les tableaux, il se trouva que ce qu'il ne regardait que comme un accessoire, fut son talent principal.

La retraite dans laquelle il vivait, ne le cacha pas au Roi, alors prince royal : ce prince l'appela à son service, et M. de Knobelsdorff, pour premier essai, orna le château de Rheinsberg, et le mit, ainsi que les jardins, dans l'état où on le voit à présent. M. de Knobelsdorff embellissait l'architecture par un goût pittoresque, qui ajoutait des grâces aux ornements ordinaires; il aimait la noble simplicité des Grecs, et un sentiment fin lui faisait rejeter tous les ornements qui n'étaient pas à leur place. Son avidité de connaissances lui fit désirer de voir l'Italie, afin d'étudier jusque dans ses ruines les règles de son art. Il fit ce voyage l'année 1738.a Il admira le coloris de l'école vénitienne, le dessin de l'école romaine; il vit tous les tableaux des grands maîtres : mais de tous les peintres d'Italie il ne trouva que Solimène digne de ceux qui, sous les Léon X, avaient illustré leur patrie. Il trouvait plus de majesté dans l'architecture ancienne que dans celle


a En 1736. Le 5 mai 1737, Frédéric annonçait à son père que le capitaine Knobelsdorff était de retour à Ruppin.