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23. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 3 août 1773.



Ma chère landgrave,

Ce qui me fait le plus grand plaisir de votre lettre est de vous savoir satisfaite et contente. On nous avait alarmés sur votre sujet, en nous mandant que vous aviez pris la maladie que la Néwa donne aux étrangers. Je me flatte qu'elle est passée actuellement, et que vous avez payé le tribut que les étrangers payent à cette sphère, ma chère landgrave, que vous habitez présentement. Je crois que toutes les choses grandes et nouvelles que vous voyez là-bas doivent vous faire grand plaisir, surtout si vous faites réflexion que, au commencement de ce siècle, cette capitale pompeuse que vous voyez, et où tant de milliers d'âmes subsistent, n'était qu'un désert marécageux où ne vivaient que des bêtes sauvages. Je fais mille vœux pour que la princesse Wilhelmine soit aussi heureuse que le comporte la condition humaine; elle retrouve dans la personne de l'Impératrice une nouvelle mère, et vous la laissez en de si bonnes mains, que vous n'en devez avoir aucune inquiétude après votre départ. Le prince votre fils est à présent à Rheinsberg, chez mon frère, qui donne quelques fêtes à ma nièce d'Orange avant son départ. Le prince attend avec impatience le moment de rejoindre sa digne mère; nous lavons vu ici, en attendant, avec bien du plaisir; mais ce qui m'en fait encore davantage, c'est l'assurance que vous daignez me donner de repasser par ici. Quel plaisir, ma chère landgrave, de vous entendre conter tout ce que vous avez vu, surtout ce qui regarde la personne de l'Impératrice! Vous devez vous attendre d'avance à toutes les questions que l'intérêt que je prends à cette grande princesse me feront vous faire. C'est un tribut que les voyageurs sont obligés de payer à ceux qui n'ont pas autant vu qu'eux, et j'attends de votre complaisance que vous me le payerez. J'ai bien senti que vos affaires domestiques vous obligeraient à presser votre retour, madame votre mère et M. le