<52>

51. A LA MÊME.

Ruppin, 12 novembre 1737.



Ma très-chère sœur,

Votre lettre m'a causé une joie inexprimable, et je ne saurais vous marquer combien je suis aise de n'avoir pas su le danger dans lequel vous avez été. En vérité, ma chère sœur, vous devriez ménager votre santé, et ne pas traiter ce qui la regarde si fort en bagatelle. Pensez un peu à l'amitié que j'ai pour vous, et daignez m'épargner les inquiétudes et les alarmes que les nouvelles de vos indispositions ne manquent jamais de me causer. C'est la seule reconnaissance que je vous demande de l'attachement et de la tendresse que j'ai pour vous.

Il faut que la Hongriea soit fatale aux jolies gens qui y sont allés, puisqu'il y en a une infinité qui ont payé le tribut à la nature. Le pauvre Natzmerb est de ce nombre; encore n'a-t-il pas eu l'avantage d'être blessé par l'ennemi, mais par un certain Diemar. L'abbessec sera inconsolable, à ce que je crois, de la mort de son neveu; ce jeune garçon promettait beaucoup. C'est bien dommage de lui. J'ai fait cette campagne dans mon cabinet, et au lieu de m'attacher à la seule Hongrie, j'ai expédié les guerres puniques, les guerres des Perses contre les Grecs, et une infinité d'autres, toutefois sans qu'il y eût de sang répandu dans toutes mes campagnes.

Je vous prie, ma très-chère sœur, de me donner de bonnes nouvelles de votre santé, et de me croire avec un attachement inviolable, ma très-chère sœur, etc.


a Voyez t. I, p. 196.

b Le capitaine de cavalerie Henri-Ernest de Natzmer, fils cadet du feld-maréchal de ce nom, faisait comme volontaire la campagne de Hongrie sous le comte de Seckendorff, lorsqu'il fut blessé à mort dans un duel qu'il eut avec le fils du général impérial Diemar.

c Madame de Sonsfeld. Voyez ci-dessus, p. 12.