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13. A LA MÊME.

Rötha, à deux milles de Leipzig, 6 septembre 1757.



Ma chère sœur,

Vous devriez sans doute être étonnée de me voir faire le métier de chevalier errant, si vous ne saviez pas les raisons et les malheurs qui m'y obligent. J'ai voulu attaquer l'armée autrichienne à Zittau; mais l'impossibilité en était si visible, que, sans vouloir exposer l'armée à une boucherie inutile, je ne pouvais pas l'entreprendre. De là je suis venu errer ici, où je trouve une armée en front, et un corps de trois mille Français à Halberstadt. Après de mûres réflexions, j'ai pris le parti de marcher à l'armée d'Erfurt, sûr que, après les avoir vaincus, je chasserais bientôt Fischera et son parti du pays de Halberstadt. Voilà, ma chère sœur, où nous en sommes. Je vous prie, ne faites pas tant de vœux pour mon existence. Les morts ne sont pas tant à plaindre que les malheureux. Je marche demain, et je crois de me trouver le 12 ou le 13 en présence de mes nouveaux ennemis. Soyez persuadée que je n'épargnerai rien pour vaincre ou mourir. Voilà tout ce que je puis vous dire, vous assurant de la tendresse infinie avec laquelle je suis, ma chère sœur, etc. Je vous envoie une élégie que j'ai faite dans le tumulte de nos camps, adressée à ma sœur de Baireuth.a


a Voyez t. XII, p. 48.

a Frédéric parle de son Épître à ma sœur de Baireuth, qui commence ainsi :
     

O doux et cher espoir du reste de mes jours!

et qui se trouve t. XII, p. 40-47. Une copie de cette Épître était jointe à celle de la lettre ci-dessus, que nous devons aux Archives de Darmstadt.