<321>inviolable que je vous ai vouée jusqu'au tombeau, étant, ma très-chère sœur, etc.

346. DE LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Baireuth, 25 septembre 1758.



Mon très-cher frère,

Il n'y a jamais de joie sans chagrin dans ce monde; si j'avais suivi mon penchant, je vous aurais témoigné d'abord moi-même la joie que m'a causée votre dernière victoire; mais deux bras enflés et le redoublement de la toux m'en ont empêchée. Je frémis quand je pense à la fâcheuse situation où vous vous trouviez avant ce coup, et dont heureusement je ne connaissais qu'une partie. Quoi qu'il en soit, vous n'êtes pas seulement destiné à extirper, comme Hercule, les bandits qui envahissent vos États, mais encore à exterminer les monstres qui vous viennent des confins de l'univers. Mon frère n'a eu affaire qu'à de pauvres tonneliers; on dit qu'il les a battus, mais je n'en crois rien, car nous en verrions déjà les suites. Tout ce que je puis dire, c'est qu'ils ont bien peur. Vous faites honte, mon cher frère, à tous ceux qui embrassent des professions. Wagnera a été tout surpris de vous voir briller au rang de ses confrères. Il avait déjà eu le bonheur de suivre vos idées, mais la maladie est furieusement tenace; il faut bien qu'elle le soit, puisque vous vous y intéressez, et qu'elle ne change point, bien loin de là, car je m'affaiblis de jour en jour davantage. Cependant l'esprit me reste toujours présent. Je suis avec toute la tendresse et le respect imaginable, mon très-cher frère, etc.

P. S. Ma sœur Amélie est heureuse d'avoir eu le bonheur de vous voir.b Si j'étais en santé, je braverais les Russes et les pan-


a Médecin ordinaire de la Margrave. Voyez les Mémoires, t. II, p. 286 et 287.

b Voyez t. XXVI, p. 212.