<271>sez heureux que de recevoir deux lettres de vous à la fois. Je dois vous remercier d'avance, ma très-chère sœur, du tableau antique que vous avez la bonté de m'envoyer; j'avoue que j'en achèterais bien quelques-uns des grands maîtres italiens; mais les Italiens sont si habiles à tromper, et ils ont infecté l'Angleterre de tant de postichi, que l'on risque trop à ces sortes de marchés, si cela ne se fait pas par des peintres très-habiles. Et comment y envoyer ces peintres? Cela devient prodigieusement coûteux. Pour les marbres, que l'on a en si grande quantité à Rome, on pourrait en faire venir plus facilement par mer, et ce sera peut-être une chose à laquelle je songerai lorsque j'aurai de l'argent de reste. Vous serez à présent si savante dans la connaissance de l'Italie ancienne et de l'Italie moderne, que vous pourriez passer pour un cicerone. Je crois que vous auriez pu voir le pape sans la cérémonie de l'inflexion du genou; mais comme on a voulu vous y obliger, je vous avoue que je suis bien aise que vous ne l'ayez pas fait, ce qui fera tomber tous les mauvais bruits qu'on avait fait courir en Allemagne. Je m'étonne que les dames de Rome s'avisent de faire les mijaurées, et d'exercer leur médisance sur votre compte; mais je crois que leur vain bourdonnement ne vous embarrasse guère. Je crains seulement que, lorsque vous vous trouverez de retour à Baireuth, vous ne vous déplaisiez chez vous, et que l'idée de toutes les grandes choses et de toutes les magnificences que vous avez vues ne vous dégoûte de votre paisible demeure. Je vous demande pardon, ma chère sœur, de mes appréhensions, et j'espère que votre philosophie se possédera sur ce point comme sur tant d'autres choses, vous priant de me croire avec la plus parfaite tendresse, ma très-chère sœur, etc.

Stefanino vient d'arriver.