<20>dant qu'il vivra, je n'aurai guère de bon temps, et je crois que je trouverai cent raisons pour une qui vous le feront oublier assez vite, car ce qui vous attendrit envers lui, c'est, ma très-chère sœur, que vous ne l'avez pas vu de longtemps; mais si vous le revoyiez, je crois que vous le laisseriez bien reposer en paix, sans vous chagriner. Consolons-nous donc ensemble, ma très-chère sœur, et faites-moi la grâce de me conserver votre précieuse amitié, comme la chose du monde dont je fais le plus de cas. Je vous assure que je n'en abuserai pas, étant avec trop de considération, d'estime, respect et amitié, ma très-chère sœur, etc.

19. A LA MÊME.

Heidelberg, 24 septembre 1734.



Ma très-chère sœur,

Je ne sais au monde ce que font les postes, car je ne viens que de recevoir aujourd'hui la lettre du 12 de ce mois, ma très-chère sœur, que vous m'avez fait la grâce de m'écrire. Je vous en rends mille grâces, et je n'ai été de longtemps aussi réjoui que je l'ai été par cette lettre-là. Comme je crois que vous serez peut-être curieuse de savoir ce qui se passe à Berlin, je vous dirai franchement que, selon toutes les nouvelles que j'ai reçues, et qui sont toutes égales, le Roi touche à sa fin, et qu'il ne pourra guère passer la fin de cette année, ayant de l'eau dans la poitrine, ni respiration, sommeil, ni appétit, et les jambes enflées au delà du genou et toutes rouges, sans douleur. Il faut s'y préparer, ma très-chère sœur; et quoique mon cœur pâtisse d'une certaine façon, en revanche je suis bien aise de me trouver alors dans un état à pouvoir vous servir et vous donner des témoignages plus réels et plus efficaces de ma bonne volonté et de mon respect. Mais, ma très-chère sœur, permettez-moi de vous dire, malgré tout cela, que mon bonheur et ma vie sont en vos mains. Vous savez que je ne saurais vivre sans vous; permettez-moi donc