<142>gens d'esprit à ce chaos de divertissements. Les souverains du monde ni les intrigues n'ont aucune part dans nos conversations; elles sont quelquefois enjouées, quelquefois sérieuses. Les sots qui n'y sont pas admis, poussés par la jalousie que leur causent les talents, veulent peut-être s'en venger aux dépens de notre petite société, et y donner des tours malins qu'elle ne mérite pas. Enfin, mon très-cher frère, il faut que moi et ceux qui sont autour de moi se soumettent au qu'en dira-t-on. Il suffit d'être bien en cour pour avoir des ennemis, et il suffit d'avoir des ennemis pour avoir des calomniateurs; c'est le cours du monde. J'espère, mon très-cher frère, que cette lettre vous détrompera entièrement sur mon sujet. Tant que je vivrai, j'en agirai franchement et sincèrement avec vous, et je croirais manquer à ce que je vous dois et à ce que je me dois à moi-même, si j'avais un autre procédé. Regardez tout le passé comme des vivacités qui, dans le fond, sont excusables quand on connaît mon cœur, et soyez persuadé que je ne vous donnerai jamais lieu de douter de la tendresse et du respect avec lequel je serai à jamais, mon très-cher frère, etc.

169. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Potsdam, 16 avril 1746.



Ma chère sœur,

S'il y a eu du refroidissement entre nous, ce n'est assurément pas moi qui ai commencé, et c'est le mariage scandaleux de ces indignes créaturesa qui a le premier jeté la pomme de discorde entre des parents qui se sont toujours tendrement aimés. Depuis, vous avez souffert qu'un faquin de gazetier d'Erlangen me déchirât publiquement deux fois par semaine; au lieu de le punir, on le laissa évader. Depuis, le Margrave eut une partialité


a Les deux demoiselles de Marwitz, dont l'aînée avait épousé le comte de Burghauss, et la cadette, Caroline, le comte de Schonbourg.