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297. DU PRINCE HENRI.

Berlin, 29 mars 1778.



Mon très-cher frère,

Je vous félicite, mon très-cher frère, d'avoir achevé toute la besogne avec la Saxe, et je vois avec un grand contentement que vous avez sujet d'être satisfait de la conduite de l'Électeur. Les conditions qu'il ajoute ne sont d'aucune importance, et très-équitables; l'échange des déserteurs sera très-utile pour votre armée. Quant au payement qu'ils exigent pour les fourrages dont votre armée pourrait avoir besoin, vous aurez la grâce, mon très-cher frère, de donner vos ordres à cet égard au commissariat de la guerre; cette dépense peut devenir très-nécessaire dans le moment de notre entrée en Saxe, et avant que nous approchions de l'Elbe. Comme tout au plus on n'aura besoin d'être fourni que pendant huit jours, c'est pourquoi cette dépense peut être supputée très-aisément. Sur l'ordre de bataille que vous avez daigné me donner il ne se trouve aucun bataillon de compagnies franches. Je sais qu'on en lève, mais j'ignore quels sont ceux que vous destinez pour l'armée en Saxe. Si je pouvais le savoir, je me mettrais avec eux en correspondance pour les hâter et même les aider quand je le pourrais. 11 n'y a point d'auditeur général de l'armée nommé encore, et je vous supplie de donner vos ordres, mon très-cher frère, à ce sujet. Il manque aussi un grand prévôt de l'armée, dont on a grand besoin pour la sûreté du camp, et encore des officiers comme nous en avons eu pour conduire les équipages. Je suis fâché, mon cher frère, de vous incommoder par tous ces détails; mais comme le temps presse d'y songer, je n'ai pas cru devoir différer de vous en écrire. Au reste, j'approuve très-fort tous les arrangements que vous prenez, mon très-cher frère; mais je voudrais gagner cent bouteilles de vin de Hongrie, et si les Autrichiens ne marchent pas le 17 du mois prochain pour prendre Dresde, j'espère les avoir gagnées.a Cette


a Le prince Henri disait un jour que les Autrichiens, contents de l'occupation de la Bavière, ne penseraient qu'à faire une guerre défensive; Frédéric paria cent bouteilles de vin vieux de Hongrie contre douze bouteilles de vin de Graves qu'il serait attaqué par les Autrichiens dès qu'il serait arrivé en Silésie. Voyez Militärischer Nachlass des General-Lieutenants Victor Amadeus Grafen Henckel von Donnersmarck, t. II, cahier II, p. 164.