<290>

171. AU PRINCE HENRI.

Le 22 octobre 1763.



Mon cher frère,

Je trouve le duc de Strélitz bien heureux de ce qu'il laisse aller le monde comme il plaît au hasard. Je crois, mon cher frère, qu'il agit sagement, et qu'il a profité d'Épicure, qui exige que son sage ne se mêle point des affaires de la république.a Pour vous donner cependant des nouvelles, vous saurez que la nouvelle cour de Saxe a congédié Brühl avec une pension de quarante-quatre mille écus. Le pauvre homme!b Il y a apparence que le bruit ne sera qu'en Pologne, où la mort du Roi vaut aux palatins une aubaine de quelques millions, et que le reste de l'Europe demeurera tranquille, et ce n'en sera que mieux. Notre mamamouchic est arrivé à Breslau, et on l'attend à Berlin vers le milieu de novembre. Le prince héréditaire de Brunswic viendra faire un tour ici, où je tâcherai de l'amuser de mon mieux. Voilà, mon cher frère, tout ce que me fournit la Saxe, la Prusse et le Brunswic; et si vous voulez quelque nouvelle de la Hesse, je pense que vous apprendrez sans surprise que le Landgrave va se mettre au rang des candidats qui aspirent au royaume de Pologne. Je vous crois à présent à Schwedt, ainsi je ne vous envoie pas de fruits; mais dès que je saurai votre retour, je prendrai la liberté de vous en envoyer une petite provision, en vous assurant de toute la tendresse avec laquelle je suis, etc.


a Voyez t. XIX, p. 178 et 330; t. XXIV, p.142 et 143.

b Voyez Molière, Tartuffe, acte I, scène V.

c Achmet-Effendi, envoyé turc. Voyez t. XX, p. 140, et, quant au mot mamamouchi, même volume, p. 34, et t. XXIII, p. 180 et 200.