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52. AU MÉME.

Leitmeritz, 5 juillet 1757.



Mon très-cher frère,

Je ne saurais que parfaitement applaudir au camp que vous avez pris; il est tout à fait conforme à mes idées dans les circonstances présentes. Comme je suis informé que l'ennemi a un dessein sur Tetschen, il faut être bien vigilant, pour que rien ne passe entre l'Elbe et votre camp. En cas que quelque corps de l'ennemi se glissât entre deux, un corps qui marcherait vers Panzen pourrait l'obliger de quitter ce dessein. Dans le cas que toute l'armée ennemie viendrait sur moi à Leitmeritz, et que cela pourrait nous obliger de nous y joindre, j'ai trouvé un camp, entre Ploschkowitz et Zahorzan, qui est très-fort; mais il ne faut pas que ce mouvement se fasse sans une nécessité très-pressante et forte.

J'ai eu des rapports que le prince Charles était marché à Wittendorf, dont cependant je ne crois rien. Quand vous aurez à m'en voyer quelque chose de pressant pour m'en avertir, vous n'avez qu'à vous servir d'un hussard qui sait la langue hongroise, que vous équiperez avec un uniforme, selle, cheval et harnais comme les hussards autrichiens sont montés, qui alors passera certainement ici; et au cas que, contre toute attente, il se perdît, il n'y aura rien de perdu ni de trahi, vu qu'il aura à porter ici une lettre mise en chiffres; mais s'il arrive, il aura toujours six ducats, que je lui ferai donner en récompense.

Au surplus, je donnerai mes ordres aux commandants des forteresses de Schweidnitz, Neisse, Glatz, et, à Cosel, au lieutenant-colonel de Kreytzen, de vous rapporter tout ce qu'ils apprennent de l'ennemi et des magasins que les Autrichiens font amasser, par où on pourra d'abord juger le but auquel ils visent.

Au reste, si les pillages des femmes et des valets vont à l'excès, il sera toujours bon que, pour les réprimer, vous fassiez statuer un exemple, en faisant pendre un de ces gens-là. Je suis avec toute la tendresse imaginable, etc.