<252>de Gaussens, secrétaire d'ambassade de France, de venir, à son arrivée à Paris, savoir de mes nouvelles, et en instruire V. M. Il s'est acquitté, Sire, avec zèle et avec empressement de cette commission si flatteuse et si douce pour moi; il a même eu la bonté de venir plusieurs fois, et j'ai eu, de mon côté, le plaisir si cher à mon cœur de lui parler beaucoup plus de V. M. que de moi. J'ai vu avec la plus douce et la plus tendre satisfaction tous les sentiments de respect, d'admiration et de reconnaissance dont M. le chevalier de Gaussens est pénétré pour V. M.; j'ai appris avec moins d'étonnement que de plaisir tout ce qu'elle fait pour le bien de ses peuples, et j'en ai vu encore l'intéressant détail dans un mémoire lu dernièrement par M. de Hertzberg à l'Académie de Berlin.a J'ai lu ce détail à toute la société d'amis qui se rassemble auprès de ma souffrante personne, et je les ai renvoyés pénétrés de vénération pour un prince si précieux à ses sujets, et si digne de servir en tout de modèle aux autres monarques.

La philosophie si consolante et si douce dont V. M. veut bien remplir les lettres dont elle m'honore est encore. Sire, un soulagement pour moi. Mais cette philosophie n'a guère d'armes et de ressource contre les maux physiques que la patience, qui ne les guérit pas.

Voilà donc la paix faite; Dieu veuille qu'elle dure longtemps, car, outre que la guerre est un grand mal, ni nous ni nos ennemis ne savons la faire. On nous menace toujours qu'elle va bientôt renaître dans le Nord et en Turquie. L'Europe n'a pas besoin de ce nouveau fléau, et je désire bien vivement qu'il épargne V. M., à qui il ne faut plus que du repos et la jouissance paisible de toute sa gloire.

On travaille toujours très-ardemment à la nouvelle édition de Voltaire qui se fait à Kehl; elle sera magnifique, et de plusieurs volumes plus riche que les précédentes. Elle paraîtra, dit-on, dans une année au plus tard, et peut-être plus tôt. Je sais


a Dissertation sur les révolutions des États, et particulièrement sur celles de l'Allemagne, lue à l'Académie le 30 janvier 1783. Voyez les Huit Dissertations que M. le comte de Hertzberg a lues dans l'Académie de Berlin. Berlin, 1787, p. 105-140.