<94>vous souhaite, Sire, de n'avoir plus besoin ni de bains ni d'eaux. On se figure communément le purgatoire plein de feux; V. M. a trouvé le sien dans l'eau. Je n'en suis point surprise : vous êtes, Sire, si bien fait au feu, qu'il ne vous causerait ni crainte, ni mal; mais vous y avez fait rencontrer le purgatoire, et pis encore, à bien des gens. Quoi qu'il en soit, vous êtes allé, Sire, vous délasser dans des exercices militaires. Ce sont les récréations des héros. Retournez cependant à Berlin, goûter celles des hommes pacifiques. V. M. en parle si bien! Elles ne peuvent manquer de lui donner du plaisir.

Je fais le même cas que vous, Sire, de l'action dans l'orateur et dans l'acteur. Horace ditb que l'on rencontre mieux la partie sensible de notre âme par les yeux que par l'oreille; c'est ce qui donne tant de pouvoir à l'action, et d'ailleurs, comme elle comprend les accents de la voix aussi bien que le geste, elle nous touche par deux sens à la fois. Le bon goût d'Auguste excita les talents; soyez longtemps, Sire, le protecteur et le guide des beaux-arts, et, dans les plaisirs qu'ils vous donneront, n'oubliez point les sentiments que je vous ai voués, ni la haute considération avec laquelle je suis, etc.

49. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

22 septembre 1765.



Madame ma sœur,

La bonté de cœur de Votre Altesse Royale paraît par les regrets dont elle honore une personne qui lui a été attachée; c'est cette qualité que je respecte en votre défunte grande gouvernante, et qui m'a engagé à lui rendre (à ce que dit l'Église) le seul service que les vivants peuvent rendre aux morts. Je ne connais point


b Art poétique, v. 179-182.