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12. A LA MÊME.

Potsdam, 3 novembre 1763.



Madame ma sœur,

Dans ce moment, je viens de recevoir une lettre de l'impératrice de Russie, dont le contenu ne me paraît guère favorable, madame, à vos espérances. Elle exige que j'instruise mon ministre en Pologne pour qu'il agisse en tout de concert avec le comte de Kaiserling; et elle y ajoute ces propres termes : « J'attends de l'amitié de V. M. qu'elle ne permettra ni le passage par son pays, ni l'entrée en Pologne aux troupes saxonnes, qui doivent y être regardées actuellement comme absolument étrangères. » Si vos lettres, madame, ne font pas changer de sentiment à l'Impératrice, je ne vois pas par quelle voie l'Électeur pourra parvenir au trône de Pologne, et par conséquent, que j'aie de la déférence pour les désirs de l'Impératrice, ou non, vous n'en deviendrez pas plus reine pour cela; et je pourrais me commettre contre une puissance que je dois ménager. Je suis persuadé, madame, que V. A. É. entre dans tout mon embarras, et que, à moins qu'elle ne fasse prendre d'autres sentiments à l'Impératrice, elle n'exigera pas de moi que je me brouille infructueusement avec un voisin qui mérite de moi les plus grands égards.

Tout ceci est une suite de la conduite que le comte Brühl a fait tenir au défunt roi de Pologne relativement aux intérêts du prince Charles, et V. A. É. se souviendra que je lui ai souvent représenté le préjudice qui lui en reviendrait.

Je souhaite, madame, qu'il se présente d'autres occasions où je puisse prouver à V. A. É. la haute estime et considération avec laquelle je suis, etc.