<5>vie d'un homme dont l'unique occupation doit être de faire le bonheur des autres.

Vos vers sont charmants. Je n'en dirai rien, car ils sont trop flatteurs.

Mon cher Voltaire, ne vous refusez pas plus longtemps à l'empressement que j'ai de vous voir. Faites en ma faveur tout ce que vous croyez que votre humanité comporte. J'irai à la fin d'août à Wésel, et peut-être plus loin. Promettez-moi de me joindre, car je ne saurais vivre heureux ni mourir tranquille sans vous avoir embrassé. Adieu.

Mille compliments à la marquise. Je travaille des deux mains, d'un côté à l'armée, de l'autre au peuple et aux beaux-arts.

127. DE VOLTAIRE.

(Bruxelles) 18 juin 1740.

Sire, si votre sort est changé, votre belle âme ne l'est pas; mais la mienne l'est. J'étais un peu misanthrope, et les injustices des hommes m'affligeaient trop. Je me livre à présent à la joie avec tout le monde. Grâce au ciel, Votre Majesté a déjà rempli presque toutes mes prédictions. Vous êtes déjà aimé et dans vos États, et dans l'Europe. Un résident de l'Empereur disait, dans la dernière guerre, au cardinal de Fleury : « Monseigneur, les Français sont bien aimables, mais ils sont tous Turcs. » L'envoyé de V. M. peut dire à présent : Les Français sont tous Prussiens.

Le marquis d'Argenson, conseiller d'État du roi de Fiance, ami de M. de Valori, et homme d'un vrai mérite, avec qui je me suis entretenu souvent à Paris de V. M., m'écrit, du 13, que M. de Valori s'exprime avec lui dans ces propres mots : « Il commence son règne comme il y a apparence qu'il le continuera; partout des traits de bonté de cœur; justice qu'il rend au défunt; tendresse pour ses sujets. » Je ne fais mention de cet ex-