<14>votre cœur, et elle permettra que j'en occupe une seconde dans votre esprit.

Je compte que mon homme de l'Épître vous aura déjà rendu ma lettre et le vin de Hongrie. Je vous paye très-matériellement de tout l'esprit que vous me prodiguez; mais, mon cher Voltaire, consolez-vous, car, dans tout l'univers, vous ne trouveriez assurément personne qui voulût faire assaut d'esprit avec vous. S'il s'agit d'amitié, je le dispute à tout autre, et je vous assure qu'on ne saurait vous aimer ni vous estimer plus que vous l'êtes de moi. Adieu.

Pour Dieu, achetez toute l'édition de l'Antimachiavel.a

131. DE VOLTAIRE.

La Haye, 20 juillet 1740.

Tandis que Votre Majesté
Allait en poste au pôle arctique,
Pour faire la félicité
De son peuple lithuanique,
Ma très-chétive infirmité
Allait d'un air mélancolique,
Dans un chariot détesté,
Par Satan sans doute inventé,
Dans ce pesant climat belgique.
Cette voiture est spécifique
Pour trémousser et secouer
Un bourguemestre apoplectique;
Mais certe il fut fait pour rouer
Un petit Français très-étique,
Tel que je suis, sans me louer.


a La fin de cette lettre, depuis le vers commençant par « L'amour sur votre cœur, » est omise dans l'édition de Kehl; nous la tirons des Œuvres posthumes, t. IX, p. 114 et 115.