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33. AU MÊME.

Potsdam, 6 février 1765.

Monsieur le baron, le dindona que Votre Sérénité a eu la bonté de m'envoyer a été servi ce midi sur ma table. On l'a pris pour une autruche, tant il était grand et pompeux; le goût s'en est trouvé admirable, et tous les convives sont convenus avec moi que vous étiez fait pour vous acquitter bien de tout ce que vous entrepreniez. Il me serait douloureux, monsieur le baron, de rester en arrière vis-à-vis de vous, et de ne pas songer à votre cuisine comme vous avez eu la bonté de penser à la mienne. Mais, comme je n'ai pas trouvé parmi les volatiles d'animal assez grand et digne de vous être offert, je me suis rejeté sur les quadrupèdes. Je vous avoue que, si j'avais pu trouver un éléphant blanc du schah de Perse, je me serais fait un plaisir de vous l'envoyer. Faute de cela, j'ai eu recours à un bœuf bien engraissé. Je me suis dit à moi-même : Un bœuf est un animal utile, laborieux et pesant; c'est mon emblème. L'âge qui me mine m'appesantit tous les jours. Je voudrais être laborieux et utile, et, pour vous l'être en quelque façon, vous voudrez bien accepter, monsieur le baron, le petit meuble de basse-cour que je prends la liberté de vous offrir; et, comme je ne me suis pas fié sur ma propre habileté, je l'ai fait choisir chez le plus expert de tous les engraisseurs. Sur ce, etc.

34. DU BARON DE PÖLLNITZ.

Berlin, 7 février 1765.



Sire,

Je supplie très-humblement Votre Majesté d'agréer mes très-humbles remercîments pour le bœuf qu'elle a bien voulu m'en-


a « Engraissé avec des noix, » comme dit le baron dans sa lettre d'envoi au Roi.