<259>justice pour mettre le droit sur le même pied qu'on l'a établi ici. Je vous félicite d'avoir attrapé la fin des harangues, mais je me flatte que vous en aurez pour demain, et, si je ne croyais vous importuner, j'y ajouterais volontiers une cicéronienne de ma part, quoique j'espère que vous croirez bien sans harangue que je vous souhaite mille biens le 1er de janvier comme le dernier de décembre, et que je suis avec toute l'estime et l'amitié possible votre fidèle ami.

Plus de Voltaire, mon cher mylord. Ce fou est allé à Avignon,c où ma sœur l'a mandé. Je crains fort qu'elle ne s'en repente bientôt.

4. AU MÊME.

Le 20 (février 1755).

Mon cher gouverneur, je suis charmé de vous voir occupé d'objets si utiles pour votre petite province. On voit que les lois de tout pays se sont ressenties du temps dans lequel on les a créées, et il restait un coin de barbarie dont enfin on viendra à bout de détruire les restes. Nous avons ici un hiver qui fait paroli au vôtre. De ma vie je n'en ai vu d'aussi vilain; il a été funeste à bien du inonde. Madame de Keyserlingka en est morte, et votre ami Gorin,b après avoir lutté longtemps contre les infirmités et les faiblesses qu'il avait gagnées dans la campagne du jeune Édouard, a enfin succombé; il est mort dans quatre jours d'une fièvre inflammatoire. Je suis bien aise que sa longue maladie m'ait empêché de faire véritablement connaissance avec lui, ce qui me l'aurait fait regretter davantage. Il a la consolation rare après sa mort que tout le monde dit du bien de lui. Adieu, mon


c C'est à Lyon que Voltaire alla rendre ses devoirs à la margrave de Baireuth, au mois de novembre 1754. Voyez ci-dessus, p. 62.

a Veuve du baron de Keyserlingk (Césarion), colonel et adjudant général du Roi; elle était morte le 15 février.

b Peut-être Goryn, ou Goring.