<320>rable, qui a ordre de me joindre le mois prochain. Voilà en vérité plus que nous ne pouvions espérer. C'est un échelon qui mènera sûrement à une paix honorable, et un sentier qui conduira un pauvre philosophe de votre connaissance à Sans-Souci, où j'espère encore vous embrasser avant de mourir. Adieu, mon cher; je vous embrasse.

244. DU MARQUIS D'ARGENS.

Potsdam, 24 mai 1762.



Sire,

J'ai l'honneur de répondre à Votre Majesté dans le moment même que je reçois sa lettre. Elle doit juger du plaisir qu'elle m'a causé; non seulement nous voyons actuellement le port après une horrible tempête, mais nous entrons dans ce port, où nous oublierons bientôt tous les maux passés. On m'écrit de Berlin que la joie y a été excessive; le courrier y est arrivé à dix heures du soir,a et toute la nuit le peuple a été clans les rues, et les maisons éclairées aux fenêtres. On n'a pas moins été joyeux à Potsdam; mais on le serait encore plus, si on avait le bonheur de vous y voir. Je me flatte que, cet hiver, la guerre sera finie. L'alliance avec la Russie vaut toutes les alliances des peuples circoncis et incirconcis; avec ce seul secours, je regarde la paix comme assurée avant quatre mois, et, si certaines gens tiennent leurs promesses et se mettent en mouvement, il est impossible que vous ne soyez pas à Sans-Souci avant le mois de septembre. La reine de Hongrie, à ce que disent des lettres de Vienne qui viennent de très-bonne main, passe la moitié de sa vie, depuis quelque temps, à prier la Vierge, et l'autre à pleurer. Je souhaite, pour la punir des maux que son ambition a faits depuis sept ans au genre humain, qu'elle ait le sort des sœurs de Phaéthon, et qu'elle se fonde en eau. J'ai l'honneur, etc.


a Samedi 22 mai 1762.