<234>place et dans la cohue du grand monde. Adieu, mon cher marquis; n'oubliez pas ceux qui combattent pour vous, et soyez persuadé de ma parfaite amitié.

178. AU MÊME.

Kunzendorf, 7 juin 1761.

Les petits voyages que vous faites, mon cher marquis, vous auront donné une partie de cet exercice nécessaire et indispensable sans lequel notre machine organisée ne peut jouir de la santé. Il semble que nous soyons destinés à être secoués toute notre vie, et que nous ayons été faits plutôt pour agir que pour penser. Prenez les eaux à Sans-Souci, vous en êtes très-fort le maître. Je me flatte que ce séjour vous fera quelquefois souvenir de moi. Vous me demandez des nouvelles de mes engagements avec ce peuple sans prépuce, portant croissant dans ses armes. Sachez donc qu'il est très-vrai que nous avons fait un traité ensemble. J'ai été obligé d'avoir recours à la bonne foi, à l'humanité musulmane, puisqu'il n'en est plus chez les chrétiens. La gazette en a menti sur l'article de l'ambassade. Ce n'est point l'usage des Turcs d'en envoyer pour des traités, à moins que ce ne soient des traités de paix. Quelque avantage que me procure cette alliance,a il ne faut point vous flatter qu'elle nous procurera encore la paix. Je crois que les Anglais feront la leur avec les Français; mais tout cela n'empêchera pas la reine de Hongrie d'aller son train, tant que les barbares partageront avec elle les travaux de la guerre. Ces barbares sont en pleine marche vers les frontières, et je m'attends que nos occupations, nos fatigues et nos embarras commenceront à la fin de ce mois. Juillet, août, septembre, octobre, seront quatre terribles mois qui me dureront des années. Il faut vous attendre à des scènes à peu près semblables à celles de l'année passée, et, pour qu'encore tout soit


a Voyez t. V, p. 121, et ci-dessus, p. 177, 184 et 185.