<75>sais que l'effort des âmes généreuses est d'obliger sans attendre le moindre retour. Néanmoins je n'oublierai jamais qu'un honnête homme doit être reconnaissant envers ceux qui l'ont servi; aussi perdrais-je plutôt la vie que de ne vous pas témoigner un jour que je sens que ce devoir me regarde à votre égard, et je vous assure que je n'aurai point de repos qu'après vous avoir témoigné par des effets comme je suis avec une parfaite amitié,



Mon très-cher ami,

Votre très-fidèle ami et serviteur,
Frederic.

29. AU MÊME.



Monseigneur mon très-cher ami,

Je suis fort étonné que vous n'ayez pas encore reçu la dernière que j'ai eu la satisfaction de vous écrire. J'espère pourtant qu'il ne lui sera pas arrivé de désastre. Pour ce qui regarde le Roi, je me sens la conscience fort nette envers lui, et Dieu est mon témoin que je n'ai d'autre but dans le monde que de lui plaire et de me divertir. Ma pauvre sœur me fait toute la peine du monde, et j'avoue que je voudrais partager la chemise avec elle. Pour le Margrave, il a pourtant un bon cœur, et il est estimable par rapport à l'amitié qu'il a pour ma sœur. Ces deux pauvres malheureux courent le pays sans avoir ni feu ni lieu, et pour se réfugier contre les chagrins du père, ils vont se consoler chez l'âme noire du beau-père; et j'avoue que je ne conçois pas comme il est possible de refuser l'assistance possible à de pauvres infortunés qui sont innocents de leur malheur, et quand on a de quoi les enrichir sans que cela fasse la moindre peine. Mais à quoi servent toutes les belles réflexions qui n'aboutissent à rien? Néanmoins je n'oublierai jamais mon devoir envers ma sœur, et étant en partie la malheureuse source de son infortune, je la partagerai volontiers avec elle. Enfin, mon très-cher ami, vous ne saunez croire dans quelle tristesse je suis quand je pense à ces choses-là; tantôt je m'en re-