<282>peut compter des Des Cartes, des Leibniz, des Newton, des Wolff, gens autant supérieurs aux autres que l'âge mûr l'est sur l'enfance; et cependant nous n'avons pas à craindre que, malgré l'évidence et la raison, ces gens nous apprennent à préférer les choses spirituelles à celles qui frappent nos sens. Selon toutes les apparences, l'on raisonnera toujours mieux dans le monde, mais la pratique n'en vaudra pas mieux pour cela.

Je reçois les cahiers que vous m'avez envoyés, avec une véritable joie, et je vous assure que je vous en tiens compte. Comment, occupé comme vous l'êtes, avez-vous encore le temps de vous appliquer à traduire, travail rude, sec et fatigant? Je souhaite de tout mon cœur que le succès de vos peines réponde à la justice qu'on vous doit. Non, il n'est pas permis que des gens comme vous aillent quêter la fortune; il faudrait qu'en vile esclave elle portât les chaînes du mérite, et fût obligée de le suivre.

Mes vœux, mon cher Diaphane, répondent parfaitement aux vôtres; si vous me témoignez souhaiter de vous trouver auprès de moi, je puis vous assurer que je ne désire pas moins de vous y voir. Puisse le ciel, moins contraire à mes vœux qu'il ne l'a toujours été, exaucer le plus ardent de mes souhaits! Puisse-t-il joindre nos destinées, de sorte qu'il n'y ait que la mort qui nous sépare, et m'empêche aussi de vous donner des preuves de la véritable estime et de la sincère amitié avec laquelle je suis,



Mon cher Diaphane,

Votre très-fidèlement affectionné
Frederic.

27. DE M. DE SUHM.

Dresde, 27 août 1736.



Monseigneur

Les inquiétudes mortelles que j'ai senties, pendant que je savais Votre Altesse Royale engagée dans un rude et long voyage, ne pouvaient être