<14>Amis, respects et réputation,
Cocus titrés et de condition.
Les tendres cœurs se vendent à l'enchère,
Et sans rougir la noblesse ose faire
Un vil métier contraire à la pudeur,
Humiliant, flétri du déshonneur,
Que la grisette à l'âme mercenaire
Fait par débauche et souvent par misère.
Qu'arrive-t-il de ces coûteux marchés?
Nos beaux seigneurs trouvent des infidèles.
Ils sont toujours impudemment trichés
Par leurs amis, ainsi que par les belles;
Un freluquet enlève leurs donzelles,
Ils sont cocus sans en être fâchés;
Leur amour vain, magnifique et bizarre,
Se refroidit, le mépris les sépare,
Et ces amis qu'ils croyaient attachés
Sont très-zélés tant que dure leur table;
Si la ruine entraîne ces seigneurs,
Que la fortune ingrate les accable,
Ces scélérats sont de tous leurs malheurs
Indifférents et joyeux spectateurs.
Si l'avantage insigne des richesses
N'a rien de vrai que des dehors trompeurs,
Fuyez, Pöllnitz, ses charmes imposteurs;
Ses faux dehors cachent des petitesses;
La fortune a de légères faveurs,
Sur vos vieux jours elle sema des fleurs,
Et c'est bien plus que toutes ses largesses.
Aimez le poste où le ciel vous a mis :
Dans votre état on a de vrais amis,
Et quelquefois de fidèles maîtresses.

Corrigée à Berlin, le 10 janvier 1750.