<III>mée et suivie qui, dès 1739, roule surtout sur le poëme dont nous parlons. « Je réforme la Henriade, dit Voltaire dans sa lettre du 18 janvier 1739, et je compte par le premier ordinaire soumettre au jugement de Votre Altesse Royale quelques changements que je viens d'y faire. »

Frédéric prenait le plus grand intérêt à ce travail; la comparaison même des changements et des additions de Voltaire avec le texte primitif était pour lui un attrayant sujet d'étude, et le 3 février, il écrivit au poëte : « J'ai le dessein de faire graver la Henriade (lorsque vous m'aurez communiqué les changements que vous avez jugé à propos d'y faire) comme l'Horace qu'on a gravé à Londres. » Voltaire répondit le 15 avril : « Le changement le plus essentiel à mon poëme, c'est une invocation qui doit être placée immédiatement après celle que j'ai faite à une déesse étrangère, nommée la Vérité. A qui dois-je m'adresser, si ce n'est à son favori, à un prince qui l'aime et qui la fait aimer, à un prince qui m'est aussi cher qu'elle, et aussi rare dans le monde? C'est donc ainsi que je parle à cet homme adorable, au commencement de la Henriade : »

Et toi, jeune héros, toujours conduit par elle,
Disciple de Trajan, rival de Marc-Aurèle,
Citoyen sur le trône, et l'exemple du Nord,
Sois mon plus cher appui, sois mon plus grand support :
Laisse les autres rois, ces faux dieux de la terre,
Porter de toutes parts ou la fraude ou la guerre :
De leurs fausses vertus laisse-les s'honorer;
Ils désolent le monde, et tu dois l'éclairer.

« Je demande en grâce à Votre Altesse Royale, je lui demande à genoux de souffrir que ces vers soient imprimés dans la belle édition qu'elle ordonne qu'on fasse de la Henriade. » Et plus tard, le 20 avril : « J'ose dédier la Henriade à un esprit supérieur. Quoiqu'il soit prince, j'aime plus encore son génie que je ne révère son rang. » Frédéric lui répondit le 16 mai : « C'est là (en Angleterre) que j'ai trouvé convenable de faire graver la Henriade. Je ferai Avant-propos, que je vous communiquerai avant que de le faire imprimer. Pine composera les tailles-douces, et Knobelsdorff les vignettes. »

Au commencement d'août 1739, lors de son voyage dans la province de Prusse, le Prince royal travaillait encore à cet Avant-propos (Œuvres posthumes, t. VIII, p. 146); il l'envoya à Voltaire le 9 septembre. Mais Pine, absorbé par son Virgile, n'eut pas le temps de s'occuper de la Henriade. Le projet de la faire imprimer avec des caractères d'argent, à Rheinsberg même, ne fut pas exécuté non plus. (Œuvres de Voltaire, édition Beuchot. t. LIV, p. 95, 102 et 115; et, Correspon-