<93> la France : on était las des subsides considérables qu'on lui payait, et l'on se flattait de faire avec la reine de Hongrie un troc de la couronne impériale contre une bonne paix. Ce qui donnait le plus d'avantage à la cour de Vienne pour cette élection, c'était que le tiers des électeurs étaient aux gages du roi d'Angleterre, et que l'électeur de Mayence, dont l'influence avait du poids dans les délibérations de l'Empire, était dévoué à la reine de Hongrie. De plus, quel candidat pouvait-on trouver pour l'opposer au grand-duc de Toscane? L'Électeur palatin était trop faible, le jeune électeur de Bavière n'avait point encore atteint l'âge éligible prescrit par la bulle d'or. Le trône impérial était regardé comme incompatible avec celui de la Pologne, ce qui semblait proscrire l'électeur de Saxe; il ne restait donc que le grand-duc de Toscane, soutenu par les armées de la reine de Hongrie, par l'argent des Anglais et par les intrigues du clergé. La cour de Versailles sentait les difficultés qu'elle rencontrerait cette fois à exclure le grand-duc du trône; elle voulut cependant lui susciter des rivaux, pour améliorer les conditions de son accommodement, Le comte de Saxe contribua le plus à décider le choix de la cour sur Auguste III, roi de Pologne. M. d'Argenson saisit vivement cette idée, dans la vue de brouiller par cette rivalité le roi de Pologne et la reine de Hongrie : il ne crut trouver d'opposition à l'exécution de ce projet que de la part de la Prusse; il était exactement informé des sujets de mécontentement qui subsistaient entre ces deux princes.

En effet, le roi de Pologne n'avait rien négligé pour rendre le roi de Prusse irréconciliable. Dès le commencement de l'année 1744, Auguste avait essayé de faire accéder la république de Pologne à l'alliance qu'il venait de conclure avec la maison d'Autriche, et qui n'était proprement qu'un renouvellement de garantie de la pragmatique sanction. Il représenta à la diète de Varsovie la nécessité d'augmenter l'armée de la couronne de vingt mille hommes, pour résister aux desseins d'un voisin ambitieux, qui allait incontinent fondre sur la