<52>En attendant, le maréchal de Coigny, dont l'intention était de défendre les bords du Rhin depuis Mayence jusqu'à Fort-Louis, s'était posté avec ses forces principales sur les bords de la Queich, d'où il s'avança vers Spire, et poussa ses détachements jusqu'à Worms et même jusqu'à Oppenheim. Ce mouvement se fit sur ce qu'il apprit que M. de Bärenklau, avec un détachement de l'armée de la Reine, avait marché à Germersheim vers Fribourg. Bärenklau fit jeter un pont sur un bras du Rhin près de Stockstadt, pour donner le change aux Français, et les attirer de ce côté-là. En même temps, le prince de Lorraine fit un mouvement avec son armée, comme s'il avait intention de passer le Necker avec sa droite pour se joindre à Bärenklau. Le maréchal de Coigny, trop crédule, se laissa abuser par ces vaines démonstrations, et commit deux fautes tout de suite : l'une, en faisant passer le Rhin à Seckendorff, qu'il chargea de défendre la partie de ce fleuve qui coule entre Spire et Lauterbourg; l'autre, en se portant avec son armée vers Worms et Frankenthal. Il lui était facile de juger que le prince de Lorraine avait résolu de pénétrer en Alsace, et d'user de toutes les ruses de la guerre pour l'en éloigner le plus qu'il le pourrait; il devait savoir d'ailleurs que ce prince pouvait disposer du pont de Mayence, à quoi l'armée française ne pouvait porter aucun obstacle.

Il semble que son projet de défense était défectueux en tout point. Son armée était séparée par corps, qui n'occupaient pas même les vrais postes d'où ils auraient pu disputer aux ennemis le passage du Rhin. Les experts ont été de l'opinion qu'il aurait dû rassembler en un corps les troupes tant impériales que françaises; qu'il devait se camper entre la Queich et le Speyerbach; garnir de petits détachements les bords du Rhin depuis Fort-Louis jusqu'à Philippsbourg; faire battre l'estrade par cette cavalerie, pour être averti à temps de l'endroit où les ennemis se préparaient à passer; tenir ses troupes prêtes à marcher au premier ordre, et attaquer sans balancer, avec