<178> l'année 1744 et 1745 :a s'il avait extorqué quelque cession au roi de Pologne, il aurait confondu les intérêts de ce prince avec ceux des Autrichiens, et il serait devenu l'artisan d'une union que la bonne politique exigeait qu'il dût dissoudre. Ensuite, l'Europe n'était que trop jalouse de l'acquisition que le Roi avait faite de la Silésie : il fallait effacer ces impressions, et non les renouveler. Ajoutez encore que le moyen le plus court de parvenir à la paix, était de rétablir in statu quo l'ordre des possessions, et sur le pied où elles étaient avant la dernière guerre. Comme les conditions proposées n'étaient ni dures ni onéreuses, elles pouvaient procurer une paix d'autant plus stable, qu'elle ne laissait ni semence d'animosité, ni de jalousie. Ces principes servirent de loi, et l'on verra dans la suite que, malgré les succès qui couronnèrent les entreprises de ce prince, il ne s'en départit jamais. Qui n'aurait cru que des propositions aussi raisonnables n'eussent été bien accueillies par le roi de Pologne? Il en fut tout le contraire cependant. Le comte Brühl n'avait que son projet en tête. Dans cette vue il avait fait revenir en Saxe le prince de Lorraine, dans l'intention de joindre cette armée à celle de Rutowski et au corps du comte de Grünne : fier de ce nombre, il se proposa de commettre le sort de son roi et le salut de sa patrie à la fortune d'un combat, sacrifiant ainsi tous les intérêts qui sont sacrés à la plupart des hommes, pour satisfaire sa vengeance particulière.

Villiers se rendit à la cour avec le visage d'un homme qui annonce une bonne nouvelle; il demanda audience, et ajouta aux propositions dont il était chargé, les exhortations les plus pathétiques, pour porter


a L'Exposé des motifs qui déterminèrent le Roi à envoyer des troupes auxiliaires à l'empereur des Romains (Gazette privilégiée de Berlin, 13 août 1744, no 97), se termine ainsi : " En un mot, le Roi ne demande rien, et il ne s'agit point de ses intérêts personnels; mais Sa Majesté n'a recours aux armes que pour rendre la liberté à l'Empire, la dignité à l'Empereur, et le repos à l'Europe. "
     Le manifeste de l'année 1745 paraît faire allusion aux dépêches du comte de Podewils adressées aux cours étrangères, et mentionnées plus haut, p. 168.