<157> dit-on, ce qui fit perdre du temps au prince de Lorraine, qui fut longtemps occupé à redresser ce désordre. Mais lorsque les Prussiens commencèrent à se présenter sur le champ de bataille, qui empêchait alors le prince de Lorraine de les faire attaquer tout de suite avec sa cavalerie? Cette gauche aurait fondu d'une hauteur sur des troupes occupées à se former, et sur d'autres qui défilaient encore.

On trouvait que le Roi n'avait pas commis moins de fautes que son adversaire. On lui reprochait surtout que par le choix d'un mauvais poste il s'était mis dans la nécessité de combattre, au lieu qu'un général habile ne doit se battre que lorsqu'il le juge à propos. On disait qu'au moins le Roi aurait dû être averti de la marche des Autrichiens : il répondait à cette accusation, que l'ennemi lui étant de beaucoup supérieur en troupes légères, il ne pouvait aventurer fort loin les cinq cents hussards qui lui restaient après tous les détachements qu'il venait de faire. Mais, objectait-on, il ne fallait pas tant faire de détachements, et s'affaiblir si fort vis-à-vis d'une armée supérieure : il répondait que le corps de Gessler et de Polentz qui alla joindre le prince d'Anhalt, pouvait être évalué contre les Saxons qui s'en retournèrent chez eux; que le détachement du général de Nassau avait été de nécessité pour pouvoir tirer de la Silésie ses subsistances, qui auraient manqué tout à fait si les Hongrois qui infestaient tout ce duché, n'en eussent été chassés; que les détachements de Du Moulin et de Lehwaldt avaient été indispensables dans les gorges des montagnes, qu'il fallait garder, ou risquer d'être affamé par l'ennemi. On n'avait qu'autant de chevaux qu'il en fallait pour apporter pour cinq jours de farine à chaque transport : si un de ces convois eût manqué, l'armée aurait été sans pain et sans subsistances. On disait que le Roi aurait dû se retirer en Silésie, plutôt que de hasarder une bataille en Bohême : mais le Roi était d'opinion qu'une bataille perdue en Bohème était de moindre conséquence qu'une bataille perdue en Silésie; et d'ailleurs une retraite précipitée aurait indubitablement attiré la