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2. AU MÊME.

Le 11 novembre 1767.



Monsieur mon cousin,

J'apprends, mon cher prince, avec bien du plaisir votre heureuse arrivée en Hollande. Si j'ai pu contribuer à votre bonheur, vous devez bien être persuadé que je l'ai fait avec plaisir; et si mes vœux sont exaucés, ce bonheur aura un cours intarissable. J'apprends que ma nièce a été bien haranguée, et que vous avez eu la bonté de répondre pour elle. Cela est certainement embarrassant pour tout le monde, surtout lorsqu'on n'entend pas la langue de ceux qui pérorent. Je la crois quitte à présent de ces compliments jusqu'à ses premières couches, où je m'imagine que l'éloquence hollandaise ne laissera pas échapper cette occasion pour se signaler, et que quelque bon bourgmestre l'assurera que l'enfant qu'elle aura mis au monde est déjà un très-grand homme tout formé. La mort a bien fait des ravages en Europe tandis que nous avons célébré des noces : la reine de Naples est expirée le jour où l'on devait célébrer ses épousailles, et la bonne duchesse de Gotha, un des ornements de l'Allemagne,a est allée dans ce pays d'où ni postes ni courriers ne reviennent au nôtre. Mais je ne dois pas vous entretenir de réflexions noires; un jeune prince qui se marie n'a que des idées couleur de chair. Puissiez-vous les garder longtemps, et ne point oublier les connaissances que vous avez faites en ce pays-ci, où votre mémoire ne périra pas, tant que nous l'habiterons.

Je suis avec une parfaite estime, etc.


a Voyez t. XVIII, p. VI et VII, art. V, et p. 187-294.