<XX> d'Adhémar, un des témoins de l'acte dont nous venons de parler, ne fait également aucune mention des Mémoires, qui probablement étaient dès longtemps, et avant son arrivée à Baireuth, entre les mains de M. de Superville, envoyé du margrave de Baireuth à la Haye depuis 1748, et établi à Brunswic, depuis 1780, comme médecin ordinaire du Duc.a Les soucis de la guerre de sept ans et les souffrances de la princesse dans sa dernière maladie expliquent suffisamment comment elle avait pu oublier l'existence de ses Mémoires.

Cet ouvrage est donc une ombre au tableau que présente la vie de la Margrave. On y voit souvent percer le ressentiment qu'elle éprouva contre son frère dans la période de 1744 à 1746, ressentiment qui se reflète également dans la correspondance de ces années, et explique les jugements injustes que l'auteur porte sur le Roi dans ses Mémoires. Nous nous hâtons de passer sur celte époque fâcheuse pour faire observer que, depuis la réconciliation, la sympathie était de nouveau complète, que Frédéric avait rendu à sa sœur toute sa tendresse, et qu'il trouva toute naturelle la résolution prise par elle de partager son sort, quelque funeste qu'il fût.b Si donc l'histoire impartiale doit blâmer les nombreuses injustices de la princesse envers son frère, le même tribunal doit absoudre, en faveur de son affection désintéressée et de son dévouement, la sœur qui réalisa pour Frédéric l'idéal de l'amitié, et auprès de laquelle il trouva le plus pur bonheur de sa vie. L'effet pénible produit par les torts de la Margrave envers son frère est d'ailleurs adouci par la lecture de la correspondance de ces deux augustes personnes, qui, selon l'expression du Roi lui-même, n'étaient qu'une âme en deux corps,c expression mémorable, impérissable monument élevé à la gloire de la margrave Wilhelmine de Baireuth.


a Voyez ci-dessous, p. 229.

b L. c, p. 341, 345 et 348.

c Voyez t. XXVI, p. 216, no52, et ci-dessous, p. 335; voyez aussi t. XII, p. 112, et t. XXV, p. 49.