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8. A LA MÊME.

(Camenz, mai 1745.)



Madame,

Les conjonctures difficiles où je me trouve, et l'embrasement général de la guerre, qui paraît souffler cet incendie au cœur de mes Etats,a m'obligent, par la vive et respectueuse tendresse que j'ai pour la personne sacrée de ma très-chère maman, de la conjurer de quitter, pendant ce temps de troubles, le séjour de Berlin. Elle peut choisir de Stettin ou de Magdebourg lequel de ces deux endroits lui paraîtra le plus propre à se retirer. Ma très-chère maman a tant de grandeur d'âme et de fermeté, que je suis persuadé que, malgré la dureté du parti que notre situation l'oblige de prendre, elle conservera sa santé, qui m'est plus précieuse que ma vie; le même coup du sort qui cause cette fatalité pourra la redresser. Je l'assure que je ne crains que pour elle, que nos affaires ne sont point désespérées, et que, avec l'assistance de Dieu, le remède ne sera pas longtemps à opérer. Je la supplie de me croire avec tous les sentiments de respect et de tendresse, et avec la plus douloureuse mortification de la nouvelle que je viens de lui annoncer, etc.b


a Voyez t. III, p. 121 et 136.

b Cette lettre, confiée au ministre comte de Podewils sous cachet volant, ne fut pas envoyée à son adresse; elle n'avait été écrite que pour le cas d'une invasion des Saxons dans le Brandebourg. Le comte de Podewils en accusa réception au Roi le 15 mai 1745.