<201>ments que mon cœur a eus pour lui pendant sa vie, et que je lui conserverai éternellement après sa mort, sont les seuls que je consulte dans cette triste nécessité qui me force à me mêler de ses affaires domestiques. Je n'ai aucun doute que vous n'entriez dans des vues aussi équitables, et que vous voudrez bien me faire savoir vos intentions là-dessus.

Je suis avec le plus profond respect et l'attachement le plus inviolable, mon très-cher frère, etc.

37. AU PRINCE HENRI.

(Opotschna) ce 19 (juillet 1758).



Mon cher frère,

Il est sûr que c'est se tromper très-fort que de vouloir trouver un bonheur parfait dans ce monde, ainsi que tout ce qui s'appelle perfection; vous devez donc vous y attendre aussi peu que tout autre mortel. Les malheurs de la vie ont tous des ressources, hors la mort des personnes qui nous sont chères. On vint dire à une femme spartiate que son fils avait été tué à la bataille de Marathon; elle répondit à celui qui lui apportait cette triste nouvelle : « J'ai su, en le mettant au monde, qu'il n'était pas immortel; »a et voilà ce que l'on doit penser en pareil cas, et, dans toutes les pertes que nous faisons, que nos affections s'attachent à des objets mortels, que nos biens ne sont qu'une jouissance précaire et incertaine, en un mot, qu'il n'y a rien de stable ni d'assuré dans cette vie. Mais, mon cher frère, après avoir fait ces réflexions, il ne faut pas devenir misanthrope. Tout homme


a Voyez t. XXV, p. 275.