<538>ner, suivant l'ordre de V. A. R., du dessein de porter lui-même ses dépêches à Rheinsberg, et je compte de les joindre ici. J'ai cependant été extrêmement tenté de faire le contraire, et voici pourquoi. Cet officier ayant été extrêmement gracieusé pendant deux jours à Potsdam, j'eusse fort souhaité qu'il eût pu l'être aussi de V. A. R., afin que, à son retour en Saxe, il eût pu se louer, monseigneur, de votre affabilité et de vos manières gracieuses envers les étrangers, manières qui sont elles seules capables d'acquérir de la réputation à un grand seigneur. Mais enfin j'ai mieux aimé vous obéir que de vous donner occasion de vous gêner, V. A. R. ne se gênant déjà que trop en d'autres occasions.

Il est certain qu'un peu de beau sexe fait un effet excellent à la campagne. Comme on n'y est pas distrait par tant d'objets différents, il semble que ceux qui s'y trouvent avec nous nous plaisent beaucoup plus qu'en ville. Je suis très-persuadé que V. A. R. saura conduire tout cela à merveille, et qu'elle fera en sorte que son beau sexe sera charmé de se trouver avec elle à Rheinsberg, et qu'elle-même sera charmée de l'y avoir. Mais qu'elle me permette de répéter en cet endroit ce que je pris un jour la liberté de lui dire ici : rien au monde n'accommoderait mieux les intérêts présents de V. A. R. que quelque héritier de sa façon.a Les sentiments de tous vos bons serviteurs sont unanimes là-dessus. Peut-être la tranquille commodité avec laquelle V. A. R. pourra y travailler à Rheinsberg sera-t-elle de meilleur effet que toutes ces visites passagères et hâtives qu'elle venait rendre ci-devant à Berlin. Je le souhaite au moins du meilleur de mon cœur.

Quoique je ne connaisse pas Gresset, je suis persuadé que sa présence contribuerait beaucoup à rendre la vie de Rheinsberg encore plus agréable qu'elle ne l'est. Mais, pour m'en expliquer en bon serviteur de V. A. R. et en fidèle Quinze-Vingt, je crois qu'il faut absolument renoncer au dessein de le faire venir. Le plaisir que sa pré-


a Voyez le Journal secret du baron de Seckendorff, p. 147 et 148.