<231> ne s'occupe qu'à inculquer des préjugés et des erreurs dans le cerveau tendre d'une jeunesse qui, les ayant sucés avec le lait, en conserve une profonde impression pour le reste de ses jours. Mais il est possible et vraisemblable qu'on diminuera de beaucoup le nombre des cénobites, les organes et les trompettes du fanatisme, et que, en mettant les évêques sur le petit pied, ils perdront les avantages du faux zèle, et deviendront tolérants, n'ayant plus rien à gagner par leurs persécutions. Voilà jusqu'où me mène mon calcul des probabilités. Croire que tous les hommes seront sans erreurs, qu'ils deviendront tous philosophes, cela est impossible par les raisons que j'en ai alléguées plus haut; mais si on les peut rendre tolérants en détruisant le fanatisme, c'est tout ce à quoi l'on pourra parvenir. Laissons donc aller le monde comme il va; contentons-nous de pouvoir penser librement.

Il dépendra de vous de m'envoyer ce M. Dubois. Il me suffit de votre témoignage, et je m'en rapporte à vous. Quand je lui aurai parlé, je vous en dirai naturellement mon sentiment. Toutefois je sais bien que ce ne sera pas en Pologne où il se sera formé le cœur et l'esprit. Je vous félicite de la naissance du Dauphin; je lui souhaite la sagesse de Marc-Aurèle, l'humanité de César, la bonté de Tite et l'esprit de Julien; car il ne faut souhaiter à un monarque français pas moins que des qualités impériales. Et pour vous, je vous souhaite santé et contentement, car vous possédez tout le reste, et je ne puis rien désirer pour vous des dons de la nature dont elle ne vous ait enrichi depuis longtemps. Sur ce, etc.