<197>tera le nombre des livres à l'infini, et le public n'y gagnera rien. Le génie ne s'attache point aux minuties; ou il présente les choses sous des formes nouvelles, ou il se livre à l'imagination, ou, ce qui est mieux encore, il choisit des sujets intéressants et nouveaux. Mais nos Allemands ont le mal qu'on appelle logon diarrhoea;a on les rendrait plutôt muets qu'économes en paroles.b Voilà bien du bavardage pour un goutteux; j'étais en bon train d'en dire davantage, si ma main (peut-être à propos) ne m'arrêtait pour ne vous point ennuyer. Sur ce, etc.

231. DE D'ALEMBERT.

Paris, 30 mars 1781.



Sire,

La dernière lettre que Votre Majesté m'a fait l'honneur de m'écrire m'a laissé des inquiétudes pour vous, et sur le présent, et sur l'avenir. Quelqu'un qui avait eu l'honneur de voir assez longtemps V. M. m'avait écrit qu'il ne l'avait jamais trouvée si bien portante. Je me suis empressé de l'en féliciter, et dans le temps que je me réjouissais avec tous mes amis de cette bonne nouvelle, V. M. en était au troisième accès violent de goutte dont elle a été attaquée cet hiver. Quoiqu'elle ait la bonté de m'apprendre qu'elle en est à présent délivrée, je crains, Sire, une nouvelle rechute, ce long et maudit hiver n'étant pas encore fini, à beaucoup près, surtout à cinq degrés plus nord


a Voyez t. XXIII, p. 399, et t. XXIV, p. 333 et 593.

b Il semble que Jean de Müller fasse allusion à ce passage vers la fin de son examen des Œuvres posthumes de Frédéric, en parlant de la correspondance avec d'Alembert. Voyez (Jenaische) Allgemeine Litteratur-Zeitung vom Jahre 1789, t. I, p. 414 et 415.