<84> pouvait y avoir quelque part. Votre lettre, Sire, me confirme dans une pensée si agréable. L'estime des hommes supérieurs est bien flatteuse, et V. M. a grande raison de dire que leur suffrage est un puissant aiguillon à toutes les vertus. Mais que fais-je, Sire? Je tombe dans le ton du carême, et nous sommes en carnaval. La méprise est pardonnable à une veuve. Éloignée par goût et par état de ces plaisirs bruyants, je réussirais mal à en faire le récit. Je ne vois tout au plus que des masques en figure. Ma ressource est la comédie française; nous avons une troupe passable pour le comique, mais trop faible pour rendre les grandes beautés tragiques. Si Voltaire avait vu jouer ici sa Mérope, il eût dit que le ciel le punissait d'avoir écrit le Dictionnaire philosophique.

Vous vous délassez maintenant, Sire, avec les beaux-arts. Je vous souhaite ce doux plaisir sans interruption pendant une longue suite d'années, étant avec les sentiments de la plus parfaite considération, etc.

35. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Le 30 janvier 1765.



Madame ma sœur,

Je crois que Votre Altesse Royale s'efforce d'avoir de l'indulgence pour mon bavardage, et qu'elle reçoit en pitié les prémices de mon radotage. J'y touche de si près, madame, que, à l'exemple de certain évêque qui chargea Gil Blas de l'avertir quand ses homélies baisseraient,a je me pourvois de même d'un thermomètre pour m'avertir de ma caducité. J'ai déjà cru, ce carnaval, que j'avais perdu l'ouïe;


a Voyez t. XIX, p. 361, et t. XXIII, p. 336.