<468> qu'elle vient de faire.a Tout ce qui intéresse V. M. a des droits sur mon cœur, et ce qui peut augmenter ou altérer son bonheur ne me touche pas moins que ce qui peut contribuer à sa gloire.

Je suis aussi flatté que reconnaissant de tout ce que V. M. veut bien me dire sur mon ouvrage dans la dernière lettre dont elle a daigné m'honorer; je la prie de recevoir mes très-humbles remercîments, et des éloges qu'elle a la bonté de me donner, et des critiques qu'elle veut bien y joindre. Il me semble que dans ce que j'ai dit, ou du moins dans ce que je pense sur la poésie, je ne diffère point réellement de V. M.; je n'ai condamné que celle qui se borne à des mots et à des images usées, celle qui ne contient point des choses, et assurément V. M. est moins faite que personne pour prendre la défense de cette poésie, qui ne ressemble guère à la sienne. A l'égard de la musique, V. M. convient qu'elle peut au moins nous rappeler les objets qui ne sont pas de son ressort, en réveillant en nous, par les sons, des sentiments semblables à ceux que ces objets nous procurent. J'avoue que je vais un peu plus loin, et je ne crois pas mon opinion tout à fait sans fondement; mais l'objet est si métaphysique, et par conséquent si contentieux, que je ne suis point surpris qu'un des plus grands musiciens de l'Europe pense autrement, et que je ne me crois, sur ce point-là surtout, aucunement infaillible.

Je ne sais si l'expulsion des jésuites d'Espagne sera un grand bien pour la raison, tant que l'inquisition et les prêtres gouverneront ce royaume. Je crois aussi que si V M. expulse jamais les jésuites de Silésie, elle n'hésitera pas à en dire la raison à toute l'Europe, et qu'elle ne tiendra pas renfermés dans son cœur les motifs de cette proscription.

On dit que V. M. a eu la bonté d'accorder une enseigne au malheureux jeune hommeb condamné par nosseigneurs du parlement


a Le prince Henri, neveu du Roi, était mort le 26 mai. Voyez t. VII, p. 43 et suivantes.

b Morival d'Étallonde. Voyez t. XXIII, p. 142.