<74>nous a conté qu'on avait fait une conspiration contre V. M. C'est bien alors que j'ai senti que je l'aimais.

Je voudrais seulement, Sire, que vous eussiez la bonté de me dire, la main sur la conscience, si vous êtes plus heureux que vous ne l'étiez à Rheinsberg. Je conjure V. M. de satisfaire à cette question philosophique. Profond respect.

163. A VOLTAIRE.

Ohlau, 16 avril 1741.

Je connais les douceurs d'un studieux repos;
Disciple d'Epicure, amant de la Mollesse,
Entre ses bras, plein de faiblesse,
J'aurais pu sommeiller à l'ombre des pavots.

Mais un rayon de gloire, animant ma jeunesse,
Me fit voir d'un coup d'œil les faits de cent héros;
Et, plein de cette noble ivresse,
Je voulus surpasser leurs plus fameux travaux.

Je goûte le plaisir, mais le devoir me guide.
Délivrer l'univers de monstres plus affreux
Que ceux terrassés par Alcide,
C'est l'objet salutaire auquel tendent mes vœux.

Soutenir de mon bras les droits de ma patrie,
Et réprimer l'orgueil des plus fiers des humains,
Tous fous de la Vierge Marie,
Ce n'est point un ouvrage indigne de mes mains.

Le bonheur, cher ami, cet être imaginaire,
Ce fantôme éclatant qui fuit devant nos pas,
Habite aussi peu cette sphère
Qu'il établit son règne au sein de mes États.