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O mon roi! conservez la vôtre;
Car le bon Dieu, qui vous la fit.
Ne saurait vous en faire une autre
Dans laquelle il mît tant d'esprit.

Il n'est pas infiniment respectueux de pousser un grand roi de questions; mais on en usait ainsi avec Salomon, et il faut bien, Sire, que le Salomon du Nord s'accoutume à éclairer son monde.

S. M. me permettra donc que j'ose lui demander encore ce que c'est qu'un arc trouvé à Glatz.a V. M. me dira peut-être qu'il faut m'adresser à Jordan; mais ce Jordan, Sire, est un paresseux, tout aimable qu'il est; et vous avez plus tôt réglé quatre ou cinq provinces, et fait deux cents vers et quatre mille doubles croches, qu'il n'a écrit une lettre.

J'arrive à Lille, qui est une ville dans le goût de Berlin, mais où je ne reverrai ni l'opéra ni la copie de Titus. V. M., et la Reine-mère, et madame la princesse Ulrique, ne se remplacent point. Je n'ai pas encore l'armée de trois cent mille hommes avec laquelle je devais enlever la princesse, mais, en récompense, le roi de France en a davantage. On compte actuellement trois cent vingt-cinq mille hommes, y compris les invalides; ce sont trois cent mille chiens de chasse qu'on a peine à retenir; ils jappent, ils crient, ils se débattent, et cassent leurs laisses pour courir sus aux Anglais et à leurs pesants serviteurs les Hollandais. Toute la nation, en vérité, montre une ardeur incroyable. Heureusement encore votre ami de Strasbourgb ne fera plus semblant de commander les armées, et l'Empereur, appuyé de V. M. et de la France, pourra bientôt donner des opéras à Munich.

Comme j'ai osé faire force questions à V. M., je lui ferai un petit conte, mais c'est en cas qu'elle ne le sache pas déjà.


a C'était, selon les Berlinische Nachrichten von Staats- und gelehrten Sachen, 1743, no 128, 24 octobre, l'arc de Valaska, ancienne princesse païenne du comté de Glatz.

b Voyez t. XIV, p. 185, et ci-dessus, p. 153.