<305> qu'il est impossible de lutter contre ce que le sort a résolu. Nous ne faisons que nous rendre malheureux, sans rien changer à notre état, et nous répandons de l'amertume sur les plus beaux jours de notre vie, dont la brièveté devrait nous inviter à ne nous point tant affliger du malheur.

Il n'est rien de plus flatteur pour moi que la confiance que vous me témoignez et le recours que vous voulez bien avoir à moi. Que je serais heureux, si je pouvais être le soutien de tous les affligés et le support des malheureux! Que je serais heureux, si je pouvais amoindrir votre douleur et trouver un baume propre à guérir la plaie que l'affliction vient de vous faire! Si mon amitié vous peut être de quelque secours, je vous prie de compter sur elle et de faire usage des sentiments que j'ai pour vous.

Nous sommes une quinzaine d'amis, retirés ici, qui goûtons les plaisirs de l'amitié et la douceur du repos. Il me semble que je serais parfaitement heureux, si vous pouviez nous venir joindre dans notre solitude. Nous ne connaissons point de passions violentes, et nous nous appliquons uniquement à faire usage de la vie.

Acceptez la bagatelle que je vous envoie. Si mon amitié ne peut se manifester par de grands effets, elle tâche du moins à tracer de légers sillons, qui sont comme les arrhes de sa bonne volonté. Je suis sûr que c'est sur ce pied que vous recevrez ce que je vous envoie, et que vous ne douterez jamais de la véritable estime avec laquelle je suis,



Mon cher Duhan,

Votre très-fidèlement affectionné ami,
Frederic.