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102. AU MÊME.

Pohrlitz, 11 mars 1742.

Mon cher Jordan, que te dirai-je d'ici? Rien de nouveau : que nous marchons, que nous allons bloquer Brünn, que nous avons pris trois cents prisonniers à Göding, que nous en prendrons davantage, et que la guerre se fera plus vivement que jamais. Juge après cela si je reviendrai à Berlin, et si la douce paix paraît proche. Je crois que cette année nous présentera de plus grands événements encore que la précédente. Les choses s'embrouillent de plus en plus, et il n'est aucune prudence humaine qui, dans un état aussi critique, puisse juger solidement des affaires. Le temps tirera le voile qui couvre à présent les événements, et alors de nouvelles scènes se développeront. On a vu une comète à Vienne, et tout le monde dit là-bas que cela leur présage du bonheur. Pour moi, je suis d'un sentiment contraire, et je m'imagine que ce n'est pas dans le ciel, mais sur terre qu'il faut tirer des horoscopes; c'est par de bonnes mesures prises à propos, par de mûres délibérations, par des résolutions promptes et justes que l'on peut juger des entreprises et de leur succès.

Adieu, cher Jordan; je te crois las de mon bavardage, mais j'espère que tu ne le seras pas de l'amitié et de l'estime que j'ai pour toi. Vale.

103. AU MÊME.

Quartier de Selowitz, 17 mars 1742.

Très-cher Jordan, la différence qu'il y a entre le loisir de Berlin et les occupations de Selowitz sont que l'on fait des vers à l'un, tandis