<17> Il y a des montagnes couvertes de glaces dans le Pérou, entre le 23e et le 24e degré de latitude, qui ne fondent jamais, et M. de Tournefort, dans son voyage du Levant, rapporte qu'à Trébizonde il gelait toutes les nuits, au mois de juillet, jusqu'au lever du soleil. Cependant les régions sont plus méridionales que les nôtres, et le soleil est par conséquent beaucoup plus longtemps sur l'horizon; et M. de Tournefort, qui a examiné la terre des climats, l'a trouvée très-chargée de sels et de nitre. Ce que V. A. R. dit sur les grottes de Besançon est très-vraisemblable; mais ces deux causes, les parties nitreuses que la chaleur du soleil fond et fait couler dans les grottes, et la terre qui en forme le lit, qui abonde vraisemblablement aussi en nitre et en sels, contribuent à ce phénomène. Mais il me semble qu'il ne s'ensuit pas que les fleuves dussent geler en été, car il est rare que, dans nos climats, la chaleur du soleil soit assez forte pour élever une assez grande quantité de particules nitreuses pour causer, la nuit, en retombant, la congélation des eaux courantes. C'est là une des raisons pour lesquelles ce phénomène est plus commun dans les pays chauds; mais il est nécessaire, de plus, pour l'opérer, que la terre abonde en nitre et en sels.

Avant de quitter la physique, oserais-je demander à V. A. R. si Thieriot lui envoya, il y a environ trois mois, un petit extrait du livre de M. de Voltaire, inséré dans le Journal des savants de septembre 1738?a Je n'avais pas osé le présenter moi-même à V. A. R.; mais j'avoue que je serais bien curieuse de savoir si elle en a été contente.

Puisque V. A. R. est informée de l'horrible libelle de l'abbé Desfontaines, elle ne sera pas fâchée sans doute d'apprendre la suite de cette affaire, à laquelle vos bontés pour M. de Voltaire font que V. A. R. s'intéresse. Tous les gens de lettres maltraités dans ce libelle ont signé des requêtes qui ont été présentées aux magistrats, et il y a


a Le Journal des savants pour Vannée 1788. A Paris, 1788, in-4, p. 534-541 : Lettre (de Voltaire) sur les Éléments de la philosophie de Newton.