<93> perde dans le repos.a A présent, je pourrais encore devenir écolier militaire; à l'âge de trente ans, l'on n'a guère de disposition pour apprendre, et un métier tel que celui de la guerre mérite plus que les applications de la vieillesse. Il faut y être élevé et nourri, et qu'une pratique plutôt prématurée que trop tardive nous enseigne cet état. La guerre hors de nos confins et limites ne laisse pas que d'être utile et nécessaire; elle corrige la luxure et le faste, elle apprend la sobriété et l'abstinence, elle rend notre corps capable de supporter des fatigues, et elle déracine tout ce qui est efféminé. Je crains que je ne vous arrête trop, cher Cassubien, et j'oublie que je parle d'un métier que je ne connais pas à un homme qui en possède toute la connaissance et la finesse par une longue pratique. Mais l'on doit savoir que les jeunes gens aiment beaucoup à raisonner et à décider; ils vous en demandent pardon, et se disent fidèles amis du digne Cassubien.

Le Gouverneur.

39. AU MÊME.

Ruppin, 11 avril 1733.

L'on a reçu à Potsdam la lettre du Cassubien, dont on lui rend grâce. Le peu de temps que l'on y a eu a empêché de répondre jusqu'à présent. L'on a été assez bien reçu. Le mentor militaireb est avec le maître; il l'a placé très-gracieusement. Le Gouverneur est si fatigué et si malade, qu'il ne peut poursuivre qu'en assurant son cher Cassubien de sa tendre et éternelle amitié.


a

La vigueur de mon bras se perd dans le repos.

Molière,

Amphitryon

, acte I, scène II.

b Le lieutenant-colonel Gaspard-Louis de Bredow. Voyez ci-dessus, p. 88.