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XXXII. ARTICLE DE GAZETTE. 1743.

Ces jours passés, le comte Gotter219-a et le baron Sweerts,219-b directeurs de l'Opéra, ont été obligés de chasser le sieur Poitier, maître des ballets, qui exerçait une brutalité tyrannique sur les danseurs, et dont l'arrogance allait si loin, qu'il commit mille insolences envers ces directeurs. Sans entrer dans le détail de tous ses mauvais procédés, dont le dénombrement ne serait propre qu'à ennuyer le public, on ne regrette que la demoiselle Roland, très-bonne danseuse, et dont le caractère doux et aimable réparait en quelque sorte les impertinences de son associé. Sans entrer dans l'espèce de liens qui peuvent unir la demoiselle Roland au sieur Poitier,219-c on n'a pu les séparer jusqu'à présent, et l'on ne peut acheter la possession d'une des plus<220> grandes danseuses de l'Europe qu'en se chargeant en même temps du fou le plus brutal et le plus brusque que Terpsichore ait jamais eu sous ses lois. Ainsi il n'y a aucun or sans alliage, ni aucune rose sans épines.


219-a Grand maréchal de la cour du Roi. Voyez t. X, p. 113.

219-b Voyez t. X, p. 194.

219-c Jordan dit dans sa lettre au Roi, du 23 juin 1742 : « Le maître des ballets est arrivé (à Berlin) avec la danseuse Roland et quelques autres. »