<159> voisine de celle où couchait son maître. La surprise de Franquini fut extrême quand il s'aperçut qu'il tenait ce secrétaire au lieu de l'ambassadeur. Tout ce qui entre d'ailleurs dans ce poëme n'est que fiction. Vous le verrez ici, car il n'est pas fait pour être vu en public. Si j'avais le crayon de Raphaël et le pinceau de Rubens, j'essayerais mes forces en peignant les grandes actions des hommes; mais avec les talents de Callot on ne fait que des caricatures et des charges.

J'ai vu ici le héros de la France,a ce Saxon, ce Turenne du siècle de Louis XV. Je me suis instruit par ses discours, non pas dans la langue française, mais dans l'art de la guerre. Ce maréchal pourrait être le professeur de tous les généraux de l'Europe. Il a vu nos spectacles, à l'occasion de quoi il m'a dit qu'une nouvelle comédie que vous avez donnée au théâtre, nommée Nanine, y avait eu beaucoup de succès. J'étais étonné d'apprendre qu'il paraissait de vos ouvrages dont j'ignorais jusqu'au nom. Autrefois je les voyais; à présent j'apprends par d'autres ce que l'on en dit, et je ne les reçois qu'après que les libraires en ont fait une seconde édition. Je vous sacrifie tous mes griefs, si vous venez ici. Sinon, craignez l'épigramme; le hasard peut m'en fournir une bonne. Un poëte, quelque mauvais qu'il soit, est un animal qu'il faut ménager.

Adieu; j'attends la chute des feuilles avec cette impatience qu'on attend au printemps le moment de les voir éclore.


a Voyez t. X, p. 226, et ci-dessus, p. 18.